mercredi 10 décembre 2014

The Heroes of the Death: Chapitre 38

Hellow les amis!
La suite de THTD est enfin arrivée! Voici le chapitre 38, plus long que d'habitude! J'espère qu'il vous plaira.
Bonne lecture!
 Chapitre 38

Cris. Douleur. Sang.
Les lames s’entrechoquent. Ainsi va la danse de la mort.
Hurlement. Blessures. Fin.
Une guerre infinie. Avec pour seule issue, les ténèbres.
Désespoir. Perte de conscience.
Coups écarlates. Prières inutiles.
Folie.
Elle se réveilla brusquement, poussant un cri strident. Ses yeux affolés examinèrent les alentours, ses battements de cœur résonnant à ses oreilles.
Où… Où suis-je ?
Posant sa main sur son cœur, elle tenta de se calmer. Un soupir s’échappa de ses lèvres. Une larme glissa le long de sa joue. Elle baissa la tête, essayant d’oublier ses rêves.
Impossible. C’est impossible.
Elle écarta ses draps, se glissa hors du lit en chancelant. D’un pas hésitant, elle posa les pieds sur le sol glacé, frissonnant à son contact. Elle se leva, s’appuya sur la coiffeuse, apercevant son reflet dans le miroir ovale. Yeux rouges, corps tremblant, cernes creuses. Pitoyable. Passant sa main moite dans sa chevelure bouclée qui ondulait au grès de l’eau, elle se détacha de cette vision misérable. Elle s’avança dans sa chambre, titubant à tel point qu’elle s’écroula au bout de quelques pas.
Vais-je vivre ainsi… pour toujours ? Me hanteront-t-ils jusqu’à ma mort ?
Son regard chocolat était teinté d’un mélange de souffrance et de culpabilité. Elle ferma les paupières un instant, repoussant tous les souvenirs douloureux.
Inspirer… Expirer… Maman m’a toujours conseillée de respirer profondément quand j’avais peur.
Alors qu’elle rouvrait les yeux, elle se retrouva nez-à-nez avec deux immenses prunelles rubis. Poussant un cri de surprise, elle se jeta en arrière.
« N’ayez crainte, Maitresse ! Je voulais simplement m’assurer de votre sécurité. Vous n’avez pas l’air d’être au meilleur de votre forme. Puis-je vous aider ?
-        Sors ! Je… Je ne veux pas… Sors immédiatement ! s’écria la jeune femme. »
Seneca sursauta, surprit par la réaction d’Illyana, mais se plia à ses ordres, se courbant dans une révérence gracieuse avant de quitter la pièce. La Métamorphe se recroquevilla sur le sol, souhaitant se faire toute petite. Tellement minuscule qu’elle serait invisible.
Il me retrouverait quand même. Il me ferait encore souffrir. Et je tuerais encore des innocents. Je ne peux pas y échapper.
Elle se releva en essuyant ses larmes d’un mouvement rageur. Les autres ne devaient pas la voir ainsi. Ils ne connaissaient qu’Illyana, la féroce combattante, la joueuse cruelle et sans-cœur. Ce personnage qu’elle avait bâti comme un bouclier, un mur de protection entre elle et ce jeu de meurtre. Dans cette enceinte fortifiée se cachait une minuscule perle, fragile et pure. Cette perle était tout ce qui lui restait de sa véritable personnalité. Et elle ne la briserait pas.
La jeune fille marcha jusqu’à la porte, continuant d’essayer de calmer sa respiration et d’arrêter ses tremblements. Quand elle posa sa main sur la poignée couleur argent, elle ne frissonnait plus, ses gestes étaient assurés, son regard déterminé. Elle était redevenue Illyana.
Ouvrant la porte, elle alla vers le hall du Palais où ils avaient prévu de déjeuner ensemble. Cette journée allait être paisible. Reposante. Il n’y avait aucune raison de s’inquiéter n’est-ce pas ? Des éclats de voix venant de l’entrée du château parvinrent à la Métamorphe. Un mauvais pressentiment se glissa dans son cœur, comme un poison dévorant. Les voix sonnaient comme des cris. Comme des plaintes. La jeune fille tenta de contrôler son cœur qui s’affolait, puis descendit les escaliers avec lenteur, son appréhension grandissant. Suivant les voix, elle ouvrit une grande porte et arriva enfin face à la scène, qui faillit la faire chanceler.
Siphano était affalé sur un fauteuil, ses cheveux poissés de sang cachant son visage. De longues cicatrices se dessinaient sur ses bras et son torse. Non-loin de lui, allongée sur un des canapés aux décorations luxueuse, Bianca demeurait immobile, les yeux fermés, sa peau livide contrastant avec les taches écarlates qui la parsemaient. Face à eux se tenait Brioche, la tête entre les mains, qui fixait ses deux amis avec un air perdu sur le visage.
« Pourquoi vous êtes sortis ?! Qu-qu’est ce qui t’as pris, Siph ? demandait le bonhomme de pain d’épices, Toi qui es si prudent d’habitude ! »
Le Guerrier ne répondit pas. Poussant un soupir, il s’avança vers l’homme-biscuit et posa ses mains sur ses épaules, essayant de le rassurer du regard.
« Vous auriez pu mourir ! Qu’est-ce que je deviendrais, moi, si je vous perdais ? Que deviendrait Léo ?
-        Léo ? dit le jeune homme aux yeux saphir, absent.
-        Oui, Léo ! Et Illy aussi ! Tu imagines ce qui aurait pu se passer ? Tu imagines ? Vous avez eu de la chance ! Enormément de chance ! »
Dans d’autres circonstances, voir Brioche passer un savon au Guerrier serait amusant. Mais devant leurs mines désespérés, leurs corps couverts du liquide écarlate de la mort, plus rien ne pouvait faire rire. Illyana s’approcha des deux joueurs et déclara, d’une voix dont elle gomma l’inquiétude qui la tourmentait :
« Qu’est-ce que tu as encore fait, Siph ? Tu ne sais décidément pas te débrouiller dans ce monde ! Tu as encore voulu jouer les héros ? Ou peut-être voulais-tu passer un bon moment en la seule compagnie de Bianca ? »
Ses coéquipiers se tournèrent vers elle, surpris par son apparition soudaine. Siphano baissa la tête en grognant entre ses dents :
« Tais-toi… Tu ne sais pas… ce qui s’est passé…
-        Explique-nous alors ! Enfin, je ne veux pas de détails intimes sur ta relation avec Bia…
-        Illy ! Arrête de le rabaisser ! Tu vois qu’il ne va pas bien ! s’exclama le bonhomme de pain d’épices.
-        Si on ne peut même plus s’amuser… rétorqua la Métamorphe en s’asseyant, jambes croisées, sur l’accoudoir du fauteuil. »
Le Guerrier lui jeta un regard noir, puis se plaça en face d’elle, aux côtés de Bianca qui demeurait les yeux clos, tel un cadavre. Son regard s’embuant, il voulut commencer son récit, pourtant Brioche l’arrêta en s’écriant :
« Attendez ! Je vais chercher Léo, ça t’évitera de raconter l’histoire deux fois !
-        Léo… n’est pas ici, Bri’, déclara Siphano avec regret.
-        Ah bon ? Il est où, alors ? Je croyais qu’il dormait encore ! »
Le jeune homme poussa un profond soupir, hésitant à reprendre la parole. Quelque chose n’allait pas, Illyana le sentait. Pourtant, elle ne s’était pas préparée à cela.
« Léozangdar est… la voix du Guerrier se remplit de sanglots, Léo n’est plus. »
L’homme-biscuit fronça les sourcils. Il n’avait pas compris. Ou ne voulait pas comprendre. La Métamorphe, elle, avait pleinement conscience de ce que Siphano venait d’annoncer. Son corps se mit à trembler sans qu’elle ne puisse l’empêcher. Ses yeux se brouillèrent de larmes qu’elle ravala immédiatement. Il fallait qu’elle conserve son rôle. Peu importe à quel point ils allaient la détester.
Brioche murmura faiblement :
« Il… Il n’est plus ? Tu ne veux pas dire qu’il…
-        Et si ! le coupa la jeune femme, Léozangdar est mort ! »
Siphano posa son regard saphir sur la Métamorphe. Elle y voyait briller une flamme de haine, de dégout, pour cette indifférence qu’elle avait face à la mort. Illyana vacilla en apercevant toute cette aversion dans ses prunelles, mais ne perdit pas son masque moqueur et impassible. Bri’, par contre, ne la regarda même pas. Ses yeux étaient perdus dans le vague, l’émotion trop violente lui faisant perdre le contrôle de son esprit. Il ne parvenait pas à comprendre. Ce n’était pas possible. Dans quelques instants, Léo allait entrer dans le château, son éternel sourire aux lèvres, et rira de la blague qu’il leur aurait fait. Il ne pouvait pas avoir disparu. Ces iris d’émeraude ne s’étaient pas éteints à jamais. Non, Brioche n’y croyait pas.
Quand elle vit l’air désorienté de son ami, la jeune femme s’approcha de lui. Même si elle devait jouer son personnage, laisser souffrir Brioche était insupportable. Elle lui prit les mains et avança son visage près du sien. Illy ne savait pas quoi dire. De toute façon, y avait-il vraiment des mots pouvant consoler d’une telle perte ? Elle noua ses bras autour du corps du bonhomme de pain d’épices et le serra contre elle avec douceur, s’empêchant toujours de se mettre à pleurer.
« Il n’est pas mort. Ce n’est pas vrai. Dis-moi que ce n’est pas vrai, répétait l’homme-biscuit à son oreille. »
La Métamorphe restait muette, incapable de lui avouer le contraire. Des larmes perlaient aux yeux du garçon. Il se détacha d’elle, se plaçant face à la jeune fille, leurs souffles se mêlant.
« Illyana… S’il te plait… »
Elle ne répondit rien, le regard baissé. Alors, Brioche approcha ses lèvres et embrassa sa bien-aimée, souhaitant s’évader de ce malheur. S’il ne pouvait pas se convaincre lui-même des mensonges qu’il s’inventait, alors il lui fallait oublier la dure vérité. Il avait toujours fonctionné ainsi. Oublier ou ignorer. Remplacer la réalité. Vivre dans un monde de rêves, un monde enfantin et joyeux. C’était pour cela qu’il avait toujours eu l’air idiot. Qu’il ne paraissait rien comprendre. Il se protégeait du désespoir extérieur, s’enfermait dans une bulle où tout paraissait plus beau. Mais en cet instant, la bulle était sur le point d’éclater. Et si cela arrivait, il ne pourrait pas résister.
La jeune fille se laissa faire, mais s’écarta de lui rapidement, la gêne la gagnant. Lorsqu’elle se tournait à nouveau vers Siphano, les joues légèrement empourprées, la Métamorphe ordonna :
« Raconte-nous donc comment c’est arrivé. Brioche, tu peux sortir de la pièce si ça te dérange de parler de cela.
-        N… Non, ça ira. Je veux savoir ce qui s’est passé. »
Le Guerrier opina, les mains tremblantes. Se rappeler de ces événements allait être douloureux. En parler sera encore pire. Siph se mit à raconter tout ce qu’il avait vécu, en omettant le fait que Xef était son ami d’enfance. Il ne parvenait pas à oublier le regard que lui avait porté le Voleur. Il s’en voulait tant de l’avoir abandonné. Le jeune homme aux yeux bleus modifia légèrement son récit par rapport à la réalité, faisant croire à ses amis qu’il avait réussi à faire fuir l’autre joueur en ayant le dessus sur lui lors du combat. Mais quelque chose le tracassait. Il ne comprenait pas ce que les Mages faisaient dans cette cavité. Pourquoi Léo avait-il emmené Bianca dans un endroit aussi dangereux ? La fille du feu avait eu de la chance que son ami ait parlé à Siph de cette grotte magnifique. Sinon, il ne les aurait jamais retrouvés et elle serait… Le Guerrier n’osa pas terminer cette pensée. Jamais, il ne laisserait cela arriver. Observant tristement la Mage immobile qui se tenait à ses côtés, il se promit de la sortir de cet état. Et de la sortir de ce jeu.
Soudain, la porte de la salle s’ouvrit, laissant Seneca entrer, la Princesse des Mers à sa suite. Se glissant auprès de sa maitresse, en ignorant ouvertement l’homme-biscuit, le serviteur fit une rapide courbette et annonça :
« Maitresse, ne souhaitez-vous pas vous repaître d’un copieux petit déjeuné préparé par la conseillère de Sa Majesté ? Vous aurez besoin de force pour la suite de votre périlleux voyage et je pensais que le meilleur pour vous serait de demeurer dans votre chambre, après vous être rassasiée. Vous me paraissez bien pâle.
-        Tu n’as pas à décider de mes actions, Seneca, rétorqua Illyana, irritée, Surtout que ce n’est pas le moment. Tu penses que j’ai la tête à penser à de la nourriture alors que l’un d’entre nous est mort ?! »
Le garçon-chat vacilla en entendant la nouvelle, puis baissa le regard, honteux.
« Par contre, tu as la tête à faire des plaisanteries de mauvais goût ! s’exclama Siphano, se relevant d’un coup.
-        Ce n’est pas moi qui ai échoué à les sauver, petit Guerrier.
-        Tu penses que c’est ma faute s’il est mort ? cria-t-il, de plus en plus enragé, Tu crois que je le souhaitais, moi ? Quand je suis arrivé, il gisait déjà à terre ! Je n’aurais pu rien faire, Illyana ! Au moins, j’ai sauvé Bianca.
-        Tu t’imagines être en position de te faire des éloges ? continua la Métamorphe, Tu as laissé le joueur fuir ! Cet homme est dangereux ! Il va sûrement nous attaquer à nouveau… »
Siphano serra les poings, exaspéré, mais sans arguments. Comment leur expliquer ? Il ne pourrait jamais lever la main sur son frère de cœur, son complice de toujours. Personne ne serait capable d’un tel acte, à part, peut-être, cette folle de Métamorphe.
Brioche, décidant enfin à agir, attrapa la main d’Illy et alla vers la sortie en tirant sur son bras.
« Calme-toi, ma chérie. Ça ne sert à rien de nous disputer. Il faut… »
La jeune fille, furibonde, retira brusquement son poignet de l’emprise du bonhomme de pain d’épices, puis s’enfuit de la pièce en hurlant :
« Je ne suis pas ta chérie ! Laissez-moi tranquille ! »
Seneca suivit hâtivement sa maitresse, jetant au passage un regard noir à Bri’. Quand ils eurent disparu tous les deux, Cordélia s’avança timidement et proposa d’une toute petite voix :
« Si… Vous ne souhaitez pas manger… Vous pourriez aller dans… l’armurerie ? Un nouvel équipement… vous sera peut-être utile… Je crois. Enfin, ce n’est qu’une proposition… »
Siphano tenta de sourire à la Princesse, même si le cœur n’y était pas, appréciant sa tentative de consolation maladroite. Pourtant, la fillette avait raison, ils devaient se réapprovisionner en armes plus puissantes s’ils voulaient passer les prochaines zones. De plus, il n’avait pas le temps de pleurer son ami, cela ne menait à rien. Il était certain que s’il l’observait à ce moment même, Léozangdar l’aurait secoué par les épaules en s’écriant :
« Arrête de pleurnicher, Siph ! Ce n’est pas en sanglotant que tu vas me faire honneur. Ris et profite de la vie, comme je l’ai toujours fait. Et veille sur elle. »
Le Guerrier se tourna vers Bianca, détaillant la belle jeune femme qui était étendue sur le canapé, paraissant sommeiller paisiblement, ses traits délicats pourtant marqués par la fatigue et le désespoir. S’approchant d’elle et s’accroupissant à ses côtés, il murmura le plus doucement possible :
« Bianca, veux-tu que je te porte à ta chambre ? Ou manger quelque chose ? »
La Mage du Feu entrouvrit les yeux, ses paupières mi-closes laissant apparaitre ses iris d’un vert terne. La flamme qui y brillait auparavant s’était éteinte, engloutie par les mers de tristesse et de douleur. Elle resta muette, indifférente aux paroles de son ami. Sans son bien-aimé, la vie était fade et sans couleurs, la faim qui la tiraillait n’avait aucune importance. Sa seule issue était de se libérer du lourd fardeau de la vie, mais la jeune fille ne savait pas comment mettre fin à ce supplice constant. Ses pouvoirs ne pouvaient lui infliger de dégâts, et elle ne possédait aucune lame. Ses prunelles décolorées se posèrent soudain sur le fourreau de cuir que portait Siphano à sa ceinture. Elle savait que le Guerrier ne l’aiderait jamais à en finir avec ce monde de ténèbres, mais elle avait entendu certaines des paroles de Cordélia, quelques instants plus tôt. L’armurerie. Là-bas, elle trouverait sûrement une quelconque lame et un endroit assez isolé pour qu’elle puisse quitter cette terre. Ouvrant ses fines lèvres, elle souffla le mot avec peine :
« Ar… murerie. »
Le jeune homme fronça les sourcils, interloqué par sa demande. Pourquoi souhaitait-elle voir des armes ? Un mauvais pressentiment l’assaillit et il se promit de ne pas quitter un instant Bianca des yeux.
La belle Mage essaya de se relever, s’appuyant sur sa main tremblante, mais elle retomba, gémissante, dans les bras de Siphano, incapable de se déplacer seule. Toutes ses forces l’avaient quittée et la faim la rendait d’autant plus faible. Le Guerrier la remit lentement sur pieds, la soutenant avec douceur, puis l’aida à faire quelques pas. Le bonhomme de pain d’épices s’approcha d’eux pour seconder son ami, mais son compagnon lui fit signe qu’il se débrouillait, continuant d’épauler la jeune femme. Brioche s’éloigna dans un soupir, s’engouffrant dans les couloirs labyrinthiques du Palais. Il ne lui restait plus qu’à aller, une fois de plus, consoler sa bien-aimée - qui d’ailleurs ne paraissait pas ressentir la même chose à son égard. Alors qu’il s’approchait de la porte de sa chambre, des voix retentirent au travers de la porte. Le ton de la Métamorphe paraissait énervé, et même s’il parlait avec calme, la forte intonation qu’employait Seneca trahissait son agacement. Plaquant son oreille contre le battant en pierre, l’homme-biscuit se mit à les écouter.
« Arrête de parler de lui comme cela !
-        Ce n’est que pour votre bien, Maitresse…
-        Tu racontes n’importe quoi ! Tu veux juste l’éloigner de moi ! Si ça se trouve, tu es une marionnette de ce Maitre qui veut nous anéantir !
-        Je ne connais pas même ce Maitre dont vous parlez. Je suis simplement en train de vous expliquer le danger que représente ce misérable biscuit.
-        Je t’ai ordonné de ne pas l’appeler comme ça !
-        Je ne fais que vous dicter votre futur si vous continuez votre relation avec lui. Je possède bien plus de connaissances que vous, Maitresse. Et je suis en mesure de vous certifier que ce garçon ne vous apportera que des problèmes, ou dans le pire des cas, votre décès.
-        As-tu donc des preuves pour m’annoncer aussi sûrement que mon seul ami dans ce jeu est un danger pour moi ? »
Brioche entendit le serviteur soupirer avec exaspération. Ses poings se serrèrent. Comment osait-il le dénigrer ainsi derrière son dos ? Heureusement, Illyana ne paraissait pas se laisser embobiner par ses mensonges. Après un long silence, le garçon-chat reprit :
« Je ne peux vous présenter mes preuves tant que vos sentiments à son égard ne seront pas effacés. Le choc que ces révélations pourraient vous causer serait regrettable, car il apporterait avec lui la dépression ou même le suicide. Ce qui serait à éviter.
-        Tu n’as pas de preuves, Senec’. Tu es juste une IA idiote qui tente de briser mon seul amour pour le bonheur de ton véritable Maitre, l’abruti qu’est le créateur de ce jeu. »
Ce fut l’insulte de trop. Le serviteur ouvrit violemment la porte et sortit, enragé par cet entretien. Brioche ne put reculer suffisamment rapidement et son regard croisa celui de Seneca. Celui-ci hurla, hors de lui :
« Qu’est-ce que tu fais ici, toi ?! Tu nous espionnais ? Eh bien, vas-y, entre et convainc ta chère amoureuse de ton innocence ! Tu verras, plus tard, tu comprendras que j’avais raison ! Vous comprendrez tous deux votre erreur ! Et ce jour-là, vous regretterez amèrement ! »
Il s’éloigna sans se retourner, d’un pas claquant qui résonna dans le couloir. Le bonhomme de pain d’épices resta perplexe, étonné par le comportement du serviteur, si calme d’habitude. Hésitant, il se glissa dans la chambre, où était allongée Illyana, les cheveux en bataille et les mains cachant son visage. Quand elle entendit les bruits de ses pas, elle se releva soudainement sur son lit, posant un regard voilé de tristesse sur son ami. Celui-ci s’assit à ses côtés, puis l’enlaça doucement. La Métamorphe ferma les yeux, les larmes coulant toujours sur ses joues. L’homme-biscuit les essuya d’un geste rassurant, caressant ses joues claires.
« Ne t’inquiète pas, mon amour. Tout ira bien. »
La jeune fille hocha la tête puis, éclatant à nouveau en sanglots, se réfugia dans ses bras. Brioche lui releva le menton et l’embrassa, sentant sa chérie frissonner au contact de ses lèvres. Il passa sa main dans les cheveux de sa belle, jouant avec ses boucles.
« Je t’aime. »
Alors qu’il déposait un autre baiser sur ses lèvres, il sentit la main d’Illyana se poser contre son torse, le repoussant lentement. Elle se détacha de son étreinte, les yeux baissés, rouge et honteuse, pendant que Brioche la regardait avec étonnement.
« Je… Je ne peux pas, Bri’. »
Le bonhomme de pain d’épices releva un sourcil, ne comprenant pas ce qu’elle voulait dire. Une idée lui traversa l’esprit et il recula en bafouillant à toute vitesse, écarlate :
« J-J-Je n’avais pas du tout ça en tête ! Je voulais simplement te consoler, hein ! P-Pas ça ! »
Illyana le regarda, s’empourprant davantage, elle aussi.
« Moi non plus, je ne parlais pas de ça ! Simplement…, la jeune fille soupira, je n’arrive pas à t’embrasser… Tu me rappelles quelqu’un… Ça me trouble.
-        A qui est-ce que je te fais penser ? demanda le garçon, intrigué. 
-        Je ne sais pas bien, Bri’. J’ai juste cette impression de déjà te connaitre, ça me fait bizarre de te faire des câlins…
-        Tu dois sûrement m’associer à un de tes amis du monde réel. De mon côté, je suis certain de n’avoir jamais rencontré une fille aussi déterminée et courageuse de ma vie. Une fille aussi magnifique et géniale. Une fille qui m’a pris mon cœur. »
La Métamorphe se recroquevilla encore, les joues en feu. Ce garçon était le seul à parvenir à briser son armure. Il s’intéressait à elle, il la comprenait, et surtout, il l’aimait. Pourtant, les paroles de Seneca lui revinrent à l’esprit. Et si tous ces compliments cachaient un plan pour la détruire ? Et si Brioche n’était pas ce grand enfant qui ignore les ténèbres de l’existence ? Peut-être que, comme elle, il ne faisait que jouer un rôle. Ce n’était pas compliqué de jouer les idiots, bien moins compliqué que d’avoir un personnage sûr de lui et mystérieux.
Secouant la tête pour chasser ces idées négatives, elle se leva de son lit, puis s’approchant de la porte, elle déclara :
« Allons à la salle à manger… Ensuite, nous jetterons un œil aux armes.
-        D’accord, mon amour ! s’écria Bri’ en sautant sur ses pieds. »
Illyana leva les yeux au ciel, sortant de la pièce avec le bonhomme de pain d’épices à sa suite.

Pendant ce temps, dans l’armurerie, le Guerrier observait les différentes épées, les pesant d’une main, et jetait de temps en temps des coups d’œil furtifs vers la Mage. Non-loin de lui, Aypierre cherchait des armures augmentant l’agilité, mais avec aussi une meilleure défense. Arthur l’accompagnait, à la recherche de matériel pour compléter son artillerie. Un lourd silence pesait sur la salle, seulement interrompu par le crissement métallique des armes. Bianca était plongée dans la contemplation de divers couteaux, aux ornements majestueux, couverts des métaux les plus précieux. La jeune femme sentait le regard de Siph fixé sur elle, l’empêchant d’agir. Il s’était placé suffisamment proche d’elle pour arrêter n’importe quel coup, les mouvements de la Mage étant ralentis par sa lassitude et sa fatigue. Elle attrapa l’une des armes, l’approcha de son visage, remarquant que Siphano ne la quittait pas des yeux, prêt à intervenir. Alors que la lame effleurait sa joue, elle rencontra un mur invisible, l’empêchant de se plonger dans la peau. Bianca lâcha l’arme dans un fracas métallique résonnant dans la salle. Elle ne pouvait mettre fin à sa vie, du moins, pas ici. Le Palais était protégé. Sûrement par ce pouvoir des Mers dont parlait la conseillère. La belle Mage tomba à genoux, le Guerrier l’attrapant de justesse et l’empêchant de s’écrouler. Elle voulut se dégager de son étreinte, le poussant avec le peu de forces qu’elle possédait, mais il la serra contre lui, l’empêchant de s’échapper.
« Bianca, mourir n’est pas une solution.
-        Qu… Qu’est-ce… que t’en sais…
-        Léozangdar aurait voulu que tu vives, répondit Siphano en évitant le mot ‘’sacrifice’’ qu’il savait douloureux.
-        Non, il veut… que je le rejoigne… Laisse-moi ! s’exclama-t-elle en reculant, s’arrachant aux bras du jeune homme. »
Elle s’effondra sur le sol, tâtant la terre pour récupérer le couteau. Le Guerrier posa son pied sur l’arme et l’écarta d’un mouvement.
« Ceci ne te sert à rien, Bianca. Je vais te déposer dans ta chambre, et tu vas te reposer. Avant, mange quelque chose, je suis certain que tu meurs de faim.
-        Tais-toi ! Je ne t’obéirais pas ! Je… veux… mourir… Cordélia !
La Princesse des Mers se tourna vers eux.
-        Tues-moi ! S’il te plait ! Tues… moi. Tu as… certainement… ce droit… »
Cette fois-ci, Siphano perdit patience. Il s’empara de la Mage et se dirigea vers la sortie de l’armurerie, la jeune femme se débattant avec la force du désespoir entre ses bras, cognant contre le dos de l’homme, griffant ses épaules sauvagement. Il ne la lâcha pas, le regard dur et déterminé, passant sous les yeux du Chevalier et de son compagnon qui les observaient avec étonnement. Il monta jusqu’à la chambre de son amie, la déposa sur le lit, la forçant à se tenir tranquille. Elle hurlait, des larmes de rage s’écoulant de ses yeux, et continuait de frapper le garçon.
Tout à coup, elle cessa de se débattre, les yeux écarquillés. Elle se figea, aussi immobile qu’une statue de pierre, un air déboussolé sur le visage. Le Guerrier fronça les sourcils, inquiet.
« Bianca ? Ça va ? »
Mais la Mage ne disait mot, comme prise d’un émerveillement inouï, un sourire éclatant se dessinant sur ses lèvres. Ses yeux de jade étaient toujours grands ouverts, la surprise et le bonheur y brillant comme un feu de joie. Ses lèvres se mirent enfin à bouger, murmurant d’une voix teintée d’espoir :
« Il est… de retour… »

C'est tout pour aujourd'hui! Le dessin de ce chapitre n'est pas vraiment un moment du récit. Il montre Illyana dans sa chambre, observant son reflet, dans le miroir, qui représente son "véritable elle", celle de la vraie vie. 
J'espère que vous avez apprécié le texte et l'illustration!
Sur ce, plein de besoux et à la prochaine! <3